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Archives 1DU

20 janvier 2008

[Indus Mundi] Finlande

Aaah, la Finlande ! Majestueuse Finlande, au peuple si pittoresque, sévère mais accueillant... Ah, Finlande ! Tes lacs, tes forêts, tes sapins... Euh... Tes lacs, tes... arbres... et ta scène musicale si originale et à la personnalité si forte. Trève de plaisanteries... Serait-ce dû à l'identité nationale, presque ethnique, précieusement conservée, ou à la mentalité de nos amis Finlandais, que cela ne cesserait d'émerveiller : ce pays même pas scandinave recèle une foultitude de projets sensibles et passionnants, expérimentaux, hors normes et excellents !

Commençons par le genre phare des musiques finlandaises, important au point qu'il en infuse une large portion de toutes les scènes musicales relatives : la musique folk. Mâtinée d'une touche d'expérimental, ou en contrepoint du metal à la KORPIKLAANI ('Clan des corbeaux'), son meilleur représentant est à mes yeux TENHI et sa déclinaison minimaliste HARMAA (pour la trilogie Airut). Si Kauan (1999) trahissait encore la proximité avec le metal-folk, néanmoins extrêmement abouti pour un premier album, TENHI est passé au fil des années de leur lent processus de composition à un ambient-folk mystique et méditatif, minimaliste et parfois psychédélique, qui sort largement du lot. Dernier véritable album à ce jour, Maaäet est une longue marche dans une forêt d'automne aux incursions dans les profondeurs englouties d'un lac ; une rétrospective pour leurs dix ans d'existence, Folk Aesthetic, est sortie au mois d'Août dernier (trois CDs et un livret de 75 pages - splendide ! - illustré par Tyko Saarikko).
http://www.tenhi.com
http://www.myspace.com/tenhiband
http://www.utustudio.com
Chronique TENHI/HARMAA : http://archives1du.canalblog.com/archives/2008/01/11/7526266.html

TENHI est l'arbre qui cache la forêt lorsque l'on s'intéresse au folk finlandais. La Finlande est un peuple de musiciens, presque tout le monde est capable de jouer d'un instrument, les groupes musicaux du dimanche ont un niveau très solide, et de ce fait, les artistes ne s'occupent guère de leur propre promotion. Deux excellents projets folk difficiles à découvrir d'ailleurs valent largement le détour : TUHAT KUOLEMAA SEKUNNISSA ('Cent morts par seconde') et CATAPLUS. Le premier, au nom remarquablement impossible à écrire de mémoire sans exercice préalable, se veut offrir un folk épuré, sans fioritures, au paroles pleines de symbolisme, presque traditionnel en un sens. Leur premier album du même nom est sorti l'année dernière chez Anima Arctica, label de J. Kettunen de Somnivore, et son successeur qui semble être encore plus prometteur devrait sortir ce premier semestre. Songwriting, guitares sèches et choeurs masculins à la Kveldssanger d'Ulver.
http://www.myspace.com/tuhatkuolemaasekunnissa
http://www.taistelu.org/tks
http://www.gutsofdarkness.com/god/objet.php?objet=9575
Quant à CATAPLUS, projet de Jaakko Mäntyranta, ce projet aux ambitions plutôt personnelles ne compte pour le moment, de manière significative, qu'une démo autrefois disponible en téléchargement mais sortie depuis en EP ('Tuohiparta'). Contrairement à TKS dont le credo du S/T est le minimum d'effets et d'instruments, Cataplus s'enlumine de flûtes, nappes synthétiques, voix murmurées, clochettes et percussions en tous genres pour une atmosphère forestière et magique.
http://www.cataplus.net/
http://www.myspace.com/cataplus
http://www.mikseri.net/artists/cataplus.38258.php

A côté de ces projets mystérieux et mystiques, on trouve aussi en Finlande des "trucs" folk-ish dont une description sommaire ne permet même pas de se représenter la musique. C'est le cas d'ALAMAAILMAN VASARAT ('Hammers of the Underword'), avec qui cela commence déjà mal avec le nom, et qui sous couvert de faire de la "fictional world music" selon leur site, délivrent quelque chose tenant du klezmer metal et du jazz kebab. Nés des décombres du groupe progressif HÖYRY-KONE ('Machine à vapeur'), les membres d'ALAMAAILMAN VASARAT se sont emparés d'instruments typiques de la musique traditionnelle/folk des Balkans et de la Turquie (violons, clarinette, trombone), les ont branchés sur une disto (mention spéciale au terrible violoncelle électrique qui balance plus que n'importe quelle guitare !) et se sont mis à raconter sans paroles des histoires de vers volants qui ont perdu leur tapis à Bagdad ('Lentävä Mato', jeu de mot débile sur les mots 'matto' tapis et 'mato' ver), d'équipe de nageurs olympiques mort-vivants, de pandas et de kebabs. Des prestations live absolument délirantes, le groupe pourrait faire une date en France l'été prochain, à ne pas manquer !
Des clips drôlissimes jouées par les membres du groupe :
http://www.youtube.com/results?search_query=alamaailman+vasarat&search=Search
http://www.vasarat.com
http://www.myspace.com/alamaailmanvasaratofficial
Review en français de leur concert au Klubi de Tampere en octobre dernier http://ayearintampere.canalblog.com/archives/2007/10/28/6687118.html

Si la Finlande est plus connue pour ses groupes de metal, en particulier death mais surtout doom avec de très grands noms comme SKEPTICISM, REVEREND BIZARRE, SHAPE OF DESPAIR, DOLORIAN ou les injustement méconnus UNHOLY, une des facettes les plus passionnantes à l'heure actuelle est celle de la musique ambient ou dark ambient. TENHI effleurait déjà le sujet, les artistes du label Aural Hypnox d'Oulu le subliment : HALO MANASH, ARKTAU EOS et ZOÄT.AON en tête, qui dépassent le concept de musique pour verser dans le rituel, la méditation et une philosophie inspirée (de très loin) de l'hindouisme. Fascinant. Prenez vos bouts d'os, vos peaux de bêtes et vos shaman drums, on va aller camper dans les bois (pas loin du lac)...
Review 1DU sur le label : http://www.parano.be/v15/news.php?action=listing&secteur=1DU&news_id=37322
http://www.auralhypnox.com
http://www.helixes.org
http://ww.myspace.com/kaosthetikkonspiration

Une des caractéristiques de la musique finlandaises est sa propension historique à s'emparer d'influences étrangères et les mixer pour en sortir quelque chose de fondamentalement original. Des groupes comme MAGYAR POSSE, de Pori, ont du mal à se classifier dans le post-rock, tant la filiation manque d'évidence et tant leur musique est rafraîchissante ; d'autres projets, à l'image de l'excellent PIMENTOLA, touchent sur le même opus musique industrielle pur et dure, néoclassique, percussions tribales et orientales, samples issus du cinéma allemand d'avant-guerre et électro dansante.
MAGYAR POSSE
http://www.myspace.com/magyarposse
http://www.magyarposse.com/
PIMENTOLA
http://www.myspace.com/pimentola
http://www.pimentola.fi (très bien réalisé)

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11 janvier 2008

[Review] Nuit & Brouillard Festival, CC Luchtbal, Antwerpen, 21/04/07

Cadav' :
De retour du NUIT ET BROUILLARD Festival, organisé par N*N, ainsi que Stéphane Et Sylvie, bien sûr, et aidés notamment de Chrysis, et en compagnie des très précieuses 1.V~ et J.S.Z. qui auront fait quelques centaines de kilomètres jusqu'au CC LuchtBal d'Antwerpen, magnifique théâtre doté d'un écran géant et d'environ 400 fauteuils des plus confortables, pour assister à de purs moments de bonheur, tout comme moi…
Vos impressions sur ce festival, mesdemoiselles, en commençant par LD50…?

J.S.Z. :
Je laisse la parole à 1.V~, n'ayant pas vu LD50…

1.V~ :
J'ai surtout retenu de LD50 la fabuleuse réaction en chaîne en vidéo de vingt minutes, avec l'usage de produits assez mystérieux et bizarres, et dont le grain neigeux des images s'accordait parfaitement à la performance sonore... Le malaise s'instille avec ces zooms sur un tableau de bord, et une main qui actionne des mécanismes d'autodestruction... Au-delà de ça, guère de souvenirs sur le plan musical. J'ai trouvé ça assez classique, en fait...

Cadav' :
J'ai personnellement eu le privilège d'assister à l'un des premiers concerts, également organisé par Nuit Et Brouillard en Novembre 2002, de ce groupe d'ambiant atmosphérique, qui n'a pas dû avoir beaucoup de frais de déplacements pour arriver jusqu'au CC LuchtBal. Ils n'ont pas une discographie des plus fournies : une cassette, un CD-R et surtout un CD, "21st Century Awakening", sorti chez N&B que j'aime beaucoup pour sa richesse et ses ambiances, loin d'être prétentieuses. J'ai beaucoup apprécié l'utilisation de synthétiseurs analogiques (la grosse boîte en bois remplie d'électronique qu'accompagnait le synthé Alesis…) Bref, une bonne mise en bouche avant d'attaquer Halo Manash…

J.S.Z. :
Concernant Halo Manash, je ne connaissais absolument pas avant, et j'avoue que j'ai été vraiment enchantée. On m'avait dit que ce groupe faisait de l'ambiant/rituel, je n'étais pas très motivée au début car j'ai toujours un peu de réticence pour ça. Un premier membre arrive sur scène et impose une certaine présence sur scène avec un fond sonore tout à fait adéquat, hypnotisant, imposant, froid et envoûtant. On peut déjà voir une machine à fumée plongeant la salle dans une sorte d'atmosphère assez intimiste. Puis après quelques minutes, un second membre intervient, ayant des cloches qui pendent autour du cou, et rendant le show encore plus envoûtant.

1.V~ :
Les nappes ambient dronesques rappellent à moitié un brame, à moitié un mugissement inhumain, pendant que les chamans s'affairent sur la scène et exécutent très sérieusement des rituels. En arrière-plan, la silhouette énigmatique d'une créature mi-humaine mi-cerf. Est-ce l'encens qui envahit la salle en même temps que les nuages du fumée dont les musiciens émergent ? Quoi qu'il en soit, les Finlandais de Halo Manash entrent dans une sorte de transe, contagieuse à des mesures variées au public qui soit restera légèrement dubitatif, soit adorera sans réserve, et qui culmine lorsque leur set quitte les ambiances lourdes et hypnotiques du début pour une furie, un ouragan sonore, un véritable déchaînement des forces naturelles qui aura d'autant plus d'impact pour les spectateurs qu'il seront rentrés dans le trip. Une idée s'insinue : est-ce que, dans ce pays scandinave, tous les hommes sont conscients de cette présence presque envahissante de la nature ? Une présence oppressante, menaçante parfois, comme prête à se dresser contre l'homme…

J.S.Z. :
En tous cas, oui, il est bon de souligner le fait qu'on assistait davantage à un rituel qu'à un show. C'était très mystique, et comme si le public n'était pas spectateur mais membre à part entière du rituel…

1.V~ :
C'est d'ailleurs, je crois, une des raisons pour lesquelles j'ai particulièrement apprécié ce set qui reste pour moi mon préféré, sentimentalement... J'ai souvent tendance à intellectualiser la musique, à beaucoup l'analyser, surtout au niveau des concepts, des idées qui la sous-tendent, etc. C'est pourquoi des personnes plus directes, qui n'ont pas adhéré au rituel, ont pu avoir un avis mitigé et préférer des sets plus puissants musicalement.

Cadav' :
Je pense quand même que Halo Manash, sans pour autant faire l'unanimité, ont largement rempli leur contrat et ont offert une véritable performance pour ce que l'on pouvait attendre d'une formation quasiment inconnue. Pour moi, ce fut une excellente surprise.
L'enthousiasme provoqué par Halo Manash est plus partagé en ce qui concerne VEL, projet de Danny Devos, membre fondateur de Club Moral avec Anne-Mie Van Kerckhoven. Je ne sais pas si c'est le peu de temps de préparation de ce duo, remplaçant au pied-levé Objekt/Urian, prévus initialement à l'affiche, et dont Carsten, le chanteur, a été victime d'un accident de bicyclette le mercredi prédécent, obligeant le groupe allemand à annuler sa participation au Festival pour clavicule cassée, mais j'estime que les personnes présentes y ont perdu au change, même si d'autres ont bien apprécié l'intensité de la performance de DDV, aidé par un ancien membre de dEUS à la guitare…

J.S.Z. :
VEL, deux personnes sur scène, aux déhanchés très particuliers faisant un peu penser à Iggy Pop, mais en version plus déjantée. Notons la tenue excentrique de celui qui s'occupait de la guitare : du papier cadeau scintillant autour des jambes, une sorte de poncho africain et une espèce de cagoule qui fait elle aussi penser à un masque africain... Musicalement, VEL offre un son bien noise par moments, accompagné de guitare distordue, et par-dessus le premier membre se met à gueuler de temps en temps sans déformation de la voix (du moins au début)... A un moment, je me demande quelle est cette musique pop rock qui passe... Des gens qui passent en voiture les vitres ouvertes avec la sono à fond ? Non, juste le mec habillé en africain qui passait un sample de "I love rock'n'roll"... La musique est assez hypnotisante... Que dire d'autre ?
Petite déception qu'Objekt/Urian n'aient pas joué... Ceci dit, ça a permis de découvrir VEL...

1.V~ :
La projection de photos façon Club Med Bombay m'a assez insupporté, je dois dire, me semblant totalement hors contexte, mais après tout cela était peut-être le but... Je me permets de reprendre ce que tu as dit juste après leur concert, Cadav' : une impression de facilité, entre le n'importe quoi costumé à la guitare et l'autre derrière son laptop qui avait plus l'air de vérifier ses e-mails que de gérer quoi que ce soit au niveau musical. L'arrêt de la projection des diapos de vacances, et également le changement dans la musique vers quelque chose de plus structuré, presque au même moment, a toutefois sensiblement amélioré mon sentiment par rapport à ce que VEL a produit là, mais le constat final reste le même : j'y suis restée totalement insensible.

Cadav' :
Je me dois de préciser que Danny Devos a donné son dernier concert sous Club Moral fin Août 2005 pour ensuite s'installer en Thaïlande. Le diaporama sur écran géant n'était donc que le résultat de ses souvenirs à Pataya...
Une pause d'une heure afin de reprendre ses esprits, visiter les stands des artistes présents (Hermétique, Les Nouvelles Propagandes, Kaosthetick, Nuit Et Brouillard…), discuter avec les paranoïaques présents ou anciens (Chrysis, RDoktor…) et réhydrater au houblon et à la RedBull des gosiers fort asséchés par cette chaleur précoce d'Avril. L'un d'eux mettra d'ailleurs un point d'honneur à se faire remarquer, surtout en plein concert de Minamata, et se fera expulser manu militari de la salle, mais au bout d'un temps qui me paraîtra excessivement long…
Minamata est l'une des deux formations de ce festival que j'attendais avec impatience. Là aussi, j'ai eu la chance d'écouter les sonorités plus bruyantes qui ont composé pour moitié cette performance dédiée à Tomoko Uemura, japonaise décédée vers le milieu des années 50, suite à la pollution par le méthylmercure déversé par les usines chimiques basées à Minamata.
Malgré les interventions intempestives d'un sombre individu éthyliquement bien chargé, le contraste offert entre les deux voix bilingues sur chacune des extrémités de la scène, les deux musiciennes japonaises, l'une au koto, l'autre au tambour traditionnel, et douées d'une voix magnifique, et les sonorités torturées, stridentes et industrielles de Tiburce, chef d'orchestre de ce concept musical soutenu par une vidéo des plus touchantes, m'ont tiré des larmes d'émotion sur la fin, en impliquant chaque auditeur de la salle dans la souffrance endurée par Tomoko Uemura, symbole humain de la bêtise humaine, trop souvent répétée comme un cycle sans fin.

1.V~ :
Les images d'industries polluantes et d'enfants déformés, le discours, tout concourt à transformer le son en irradiation toxique, en substance corrosive s'infiltrant partout et rongeant peu à peu nos tympans... Même si j'ai trouvé le propos final un peu maladroit et décousu au regard de la performance générale, j'ai préféré sans aucun doute les passages noise à mon sens plus puissants et évocateurs à ceux du set suivant, celui de Propergol…

J.S.Z. :
Des images violentes, associées à des bruits associés entre eux formant une musique hypnotisante de laquelle on ne sort pas indemne... Des vibrations excessives provoquant un mal-être aussi bien physique que mental... en deux mots : puissant et génialissime.

1.V~ :
Pour moi, ce set a énormément ressemblé au dernier Lynch, Inland Empire, que j'ai presque vu dans des conditions de malaise, ceci explique peut-être cela... La répétition ad nauseam des mêmes voies de chemin de fer, du même quai de métro, de manière décalée, aurait de quoi rendre le plus placide des hommes complètement épileptique. Très cinématographique (on repense à la scène finale de Lost Highway lorsqu'on voit ce plan sur un homme qui conduit et ces gyrophares de voitures de police), énigmatique, poussant à chercher un sens et une histoire là où il n'y a rien à trouver, la projection est de l'art brut, et rendrait presque parano...

Cadav' :
De mon côté, j'ai pris Propergol comme une expérience cinématographique qui m'en mettait plein les yeux et plein les tympans. Le déluge sonore et visuel poussé à son paroxysme, sans pour autant être insupportable, fut un véritable voyage dans le monde violent et intense de Jérôme N., efficacement secondé par Clément B., mais tous deux très discrets derrière leurs machines, s'effaçant pour laisser la toute puissance d'une musique et de visuels qui ont pris tout leur sens dans des conditions parfaites de salle de cinéma, grand écran et fauteuils très confortables. De surcroît, j'ai trouvé le son parfait!

J.S.Z. :
Un déchaînement de violence!

1.V~ :
Dernière ligne droite du Festival Nuit & Brouillard : Dernière Volonté.

J.S.Z. :
Il était prévu que Dernière Volonté nous jouent "Obéir et Mourir" avec quelques modifications... Geoffroy D. y a ajouté des textes, assez mal chantés... Ça ne collait pas très bien, il a d'ailleurs eu des problèmes de micro (en fait, des problèmes dus au fait que les réglages effectués par l'ingénieur du son durant les balances ont été attribués à un autre groupe). On l'a senti assez exaspéré, et rapidement il est passé à autre chose en jouant des titres présents sur les autres albums, dont "Au travers des Lauriers", "La nuit revient", "Mon mercenaire" présent sur l'EP avec Novy Svet... Ce qui manque, c'est la présence, le charisme.
L'ambiance se fait boîte de nuit pour quelques spécimens passablement enivrés se mettant à danser devant Geoffroy D. Est-ce cela qui l'a poussé à entamer une flasque de whisky sur scène ?
Jusqu'au bout, le son du micro était mal réglé. Cependant, la voix était moins mauvaise que les autres shows de DV (ceux qu'on peut trouver sur Youtube par exemple sont assez catastrophiques).

1.V~ :
J'ai pu constater que le public était constitué aux 2/3 d'artistes eux-mêmes et que c'est dû au développement de structures comme MySpace... J'ai trouvé ça très intéressant.

Cadav' :
Là dessus, je ne suis pas d'accord pour dire que c'est dû à MySpace. Ça a toujours été ainsi, je veux dire par là que cette scène n'a jamais eu besoin de MySpace pour voir les 2/3 de son public composé d'activistes.

1.V~ :
Public accoutré de manière pour le moins singulière : beaucoup de treillis noirs, quelques uniformes et une tenue de pêche en latex vert olive du plus bel effet…! Il me semblait que tu avais dit que la proportion avait beaucoup évolué depuis quelque temps... mais c'était peut-être pas toi en fait. Ou alors j'étais encore un peu sourde…!

Cadav' :
Oui, elle a malheureusement évolué dans le sens où ce sont toujours les mêmes qui viennent à ce type de concerts, et activités aidant, la proportion d'artistes et d'activistes est de plus en plus forte pour un public de moins en moins enclin à se déplacer dans l'ensemble.

1.V~ :
De manière postérieure, les bons mots n'ont pas manqué d'affluer sur cette performance : « Ils devaient jouer Obéir et Mourir, nous avons fait le contraire : Désobéir et Courir », « Indochine au pays des fafs » ou « Etienne Dachau »... « De toute façon, Derrière Violenté, c'est de la gaypop », nous martèle un Cadav' qui a pourtant usé la moitié de sa mémoire de reflex pour ce set (près de quatre cents photos, tout de même !...)

Cadav' :
C'est vrai, mais il est tellement beau, le Geoffroy dans son pantalon en cuir, qu'on en virerait sa cuti à force de le regarder! On a beaucoup remarqué le maniement de main de maître du fil de micro par Geoffroy (le pauvre au premier rang doit encore s'en souvenir) et le magnifique lancer de blouson en cuir sur l'arrière-scène, un des éléments du total look black leather du duo : en plus du pantalon moulant et du blouson « emprunté à sa copine » du percussionniste, les bottes et les gants, très mode pour le prochain régime totalitaire.

Qu'il fut difficile de quitter le CC LuchtBal après une telle soirée, et tant d'excellents concerts! Certains auraient voulu prolonger la soirée, mais néanmoins la foule se disperse et les délégations repartent vers leurs véhicules ou leurs hôtels respectifs – pour notre part, un joyeux groupe d'une douzaine de personnes rôdant sur les routes d'Anvers...
La nuit fut très courte pour certains, cidre ou conversations au sommet obligent, le petit-déjeuner généreux pour d'autres (trois oeufs et cinq doses de miel sur trois petits pains, avec deux cafés et deux jus de fruits, me dit-on !...), et dans l'après-midi, chacun repart de son côté avec tous ces souvenirs en tête...

Nous avons appris dans les jours suivants que le nombre d'entrées avait atteint le seuil de rentabilité et permettait ainsi aux organisateurs de commencer à préparer le prochain événement. Excellente nouvelle, et encore un grand merci à N*N et aux organisateurs!

La présentation des groupes et du festival, avec les liens vers leurs sites et des extraits mp3
Quelques extraits vidéo des sets de Minamata et Propergol à cette adresse
De la même façon, des extraits de la performance filmée de Minamata sont diffusés sur leur site et un DVD devrait sortir paraître, ainsi que la vidéo support de Propergol (site).

Vivement la prochaine, prévue en Septembre 2007 avec un festival Tesco Organization sur deux jours, cette fois-ci !

- Cadav-55778, J.S.Z.-88604 & 1.V~-19937

11 janvier 2008

[Cinéma] Inland Empire

Dans une salle noire, le rai de lumière d'un projecteur, puis le grésillement d'un vynile parlant de tubes en vogue dans les régions baltes. Une scène floue et floutée dans un hôtel obscur aux décors de stuc. Une sitcom parlant de lapins... Puis Laura Dern, au brushing impeccable, dans une maison remplie de domestiques polonais et d'un mari inquiétant. Un film sur lequel l'ombre angoissante d'une tuerie plane. Puis la réalité commence à s'effilocher... L'intrigue d'Inland Empire doit être l'intrigue la moins résumable de l'histoire du cinéma (si tant est qu'il y en ait une). Attention : Cet article est susceptible d'en révéler une grande part et comporte des suppositions quant au sens du film. Si vous souhaitez voir Inland Empire avec l'esprit vierge et innocent et des yeux neufs, restez-en là !

"Un truc", dixit la lapidaire et laconique formule de l'Express. Un "calvaire de trois heures" pour les Cahiers du Cinéma. Le dernier cauchemar de Lynch, après un Mulholland Drive unanimement acclamé, semble laisser un bon nombre d'aficionados dans la perplexité. Et pour cause : autant il était relativement simple, après quelques jours d'intense brainstorming tout du moins, de "sentir" quelles obsessions poursuivaient les personnages de Mulholland Drive et Lost Highway (l'amour fou et déçu, contrarié, de la blonde Diane dans l'un ; l'impuissance de Fred Madison, physique d'un côté, mais aussi son impuissance à posséder la femme qu'il désire et qui lui glisse entre les doigts pour l'autre... ou de la façon dont chacun interprétera), autant Inland Empire semble casser un schéma devenant soudain bancal et déséquilibré.

Plus de sensualité dans Inland Empire, plus de glamour, plus de strass ; dès les premiers plans dans la maison de Nikki Grace, malgré son statut de star du cinéma en devenir, on plonge en plein bad trip, sentiment accentué par le grain de la caméra DV et les zooms frénétiques et oppressants sur les visages des personnages. Le discours de l'étrange voisine, Grace Zabriskie, est d'emblée complètement décousu, fait référence à des événements et des lieux que l'on pense voir apparaître par la suite, mais qui n'arrivent pas, ou d'une façon totalement distordue. Et Nikki Grace, "up for a role" apparaît vide, artificielle, mécanique, un ersatz des blondes voluptueuses et fascinantes qui avaient habité les précédents opus, la destroy Laura Palmer, Betty/Diane et l'insaisissable Alice de Lost Highway. Quasiment un simulacre, une carcasse vide de personnage qui joue une multitude de "rôles à Oscar" à la fois dans une intrigue "ineffable" qui lui échappe complètement.

Et que dire de la brune ? A chaque fois, elle avait été le pendant de la blonde, dans des relations de désir, d'envie ou de fantasme. Rien de tout cela dans Inland Empire. La brune cette fois ne fait que pleurer en regardant les déboires de Nikki et de ses nombreux avatars à la télévision, où passent d'absurdes sitcoms dans lesquelles jouent des lapins. Elle dérive entre la Pologne des années 20 et celle d'aujourd'hui, sans aucune raison apparente, si ce n'est la très vague mention du film original dont Nikki tourne le remake. Aucune sensualité non plus dans le baiser qu'elles échangent finalement, contrairement à celui esquissé par Laura et Donna dans Twin Peaks. Justement, plus les avatars de la blonde se multiplient, plus ils semblent se dissoudre et perdre tout existence, toute réalité. A la fin ne subsistent que de vagues images superposées de la même femme dans de multiples réalités, sans aucune identité réelle. Seule la brune reste dans un happy end qui tombe comme un cheveu sur la soupe à la fin des trois heures.

Pour parler franchement, j'ai dû rire nerveusement plusieurs minutes au moment où les lumières se sont rallumées. Précédemment, on pouvait connecter la quasi-totalité des éléments à un même réseau de sens ; si tous n'avaient pas de nom, on ressentait confusément la pièce du puzzle qu'ils représentaient. Ici, on parvient à grand-peine à relier une moitié des élements (l'absence et la tromperie) et le reste se noie dans un océan de nonsense à la limite du grotesque (peut-être est-ce l'abandon de l'image lisse et glacée des précédents opus qui donne cette impression ? Ou Lynch joue-t-il délibérément à briser en menus morceaux le rêve hollywoodien patiemment démantibulé dans Mulholland Drive, mais sans s'embarasser cette fois de quelconques préliminaires ?). Lynch n'a jamais été aussi difficile à comprendre, et son cinéma n'a jamais été aussi difficile à saisir. Ou bien il est plus difficile de déterminer s'il y a vraiment quelque chose à comprendre... Pied-de-nez au cinéma ?

"During a conversation between David Lynch and Laura Dern, Laura mentioned that her husband was from the Inland Empire (an area east of Los Angeles County, including Riverside and San Bernadino County). Lynch confesses he stopped listening to what she was saying because he loved the sound of the words "Inland Empire", and finally decided on these words as the title of his movie because "I like the word inland. And I like the word empire."" (Source : Internet Movie Database)

- 1.V~-19937

11 janvier 2008

[Découverte] Tenhi-Harmaa

2006 a vu la parution de deux perles finlandaises, qui pour moi vont aller rejoindre la liste très restreinte des albums vers lesquels je reviendrai toujours, quels que soient l'humeur ou le trip musical du moment. Probablement le fait de ne pouvoir caractériser correctement ce dont il s'agit y est pour quelque chose... mais, quoi qu'il en soit, laissez-moi vous présenter Tenhi et son pas-vraiment-side-project Harmaa.

TENHI

S'il fallait définir l'essence d'un pays comme la Finlande, du moins d'un point de vue extérieur et presque touristique... Tenhi est une formation de 5 musiciens (Ilmari Issakainen (piano, percussions, basse, guitare, voix), Ilkka Salminen (guitare, voix), Tyko Saarikko (claviers, voix, guitare, jews harp, percussions), Eleonora Lundell (violon) et Veera Partanen (flûte)) dont le travail est énormément marqué, d'une part, par le processus de composition, et en particulier la façon dont celui-ci s'inscrit dans la durée (les albums sont planifiés trois ans à l'avance !...) : partant d'une thème ou d'une idée, les musiciens essaient plusieurs arrangements afin de retranscrire l'émotion, la sensation qu'ils souhaient pour le morceau ; et d'autre part par la profonde perception de la nature et du cycle des saisons. Maaäet est un parfait exemple (voire un exemple parfait...) de ce procédé, et alors que les productions sous le label Harmaa en comportent beaucoup moins, les albums de Tenhi s'orientent délibérément vers une musique comportant beaucoup d'éléments de folk traditionnel - quoi que, on ne peut pas vraiment qualifier un album de Tenhi de traditionnel, si ce n'est que les instruments utilisés le sont, et leur sonorité organique extrêmement travaillée pour rendre cette impression mystique d'une nature prise par la glace, de plaines blanches, figées dans le froid de l'hiver : violon et guitare acoustique prédominants, percussions presque austères, voix et choeurs sépulcraux, peu de piano, si ce n'est pour tisser quelque mélodie fragile, à l'instar de la dentelle glacée d'un flocon de neige, sur Salain. Un folk à la fois dépouillé (Viimeiseen) et parfois fiévreux (Vähäinen Violetissa)... mais que peuvent décrire de simples mots ? D'autres purent y voir l'expression d'un automne funèbre, et rajouteront qu'avec Maaäet, tout cela se trouve simplement au-delà du langage, et je ne peux qu'agréer avec eux.

Hallavedet (1998)
Kauan (1999)
Väre (2002)
Maaäet (2006)

HARMAA

Airut:Aamujen ("Omen of Mornings") a été réédité sous le nom de Tenhi l'automne dernier, mais l'appellation Harmaa ("gris" en Finnois) se justifie pourtant, puisque ce projet n'a été créé que par les précédemment cités Tyko Saarikko et Ilmari Issakainen, le processus de composition "démocratique" de Tenhi impliquant trop de personnes pour s'adapter à leur rythme de création. Comment imaginer, dès lors, que l'on puisse dégager une telle magie d'une simple batterie, d'un piano, d'une basse et de voix ? Si l'intemporel Maaäet évoquait plutôt une nature figée dans l'hiver ou l'automne, le caractère plus dynamique, plus vivant peut-être, plus en prise avec les sentiments humains de Airut:Aamujen n'ôte rien à son exceptionnelle qualité. La trilogie Airut, dont le présent opus est précédé de Airut:Ciwi (pouvant se traduire par "Herald of Stone", et introuvable du moins de ce que j'en sais jusqu'à la parution de Folk Aesthetic qui l'inclus sur le premier disque de la rétrospéctive) et sera suivi de Airut:Savoie sur lequel Tyko et Ilmari vont commencer à travailler dès le printemps 2008, est basée sur les visions de ces magiciens finlandais, dans le prolongement de certains titres de Tenhi (thèmes empruntés à Kielo, présent sur leur premier album Kauan, pour Airut:Ciwi et Airut:Aamujen ; prolongement des chansons Maa Syttyy et Tuulenkaato sur Maaët pour Airut:Savoie). Le piano, cette fois prédominant, tisse des mélodies délicates, des hymnes à l'instant, à l'image de la première photo du livret, celle d'une barque brûlant au milieu des roseaux. Des morceaux organiques et sensuels où une légère voix féminine fait contrepoint à celle de Tyko, des morceaux d'une beauté transcendante - des quelques notes cristallines égrenées au début de Oikea Sointi (Lay down a tune) se muant en envolées d'une mélodie obsédante, le désir, l'érotisme jusqu'à la souffrance quasi orgasmique de Hiensynty (Burning)... une sorte de kaléidoscope d'émotions et de sensations, de "brief passing moments", touchant très profondément. Superbe.

Airut:Ciwi (2001)
Airut:Aamujen (2006)
Airut:Savoie (2007 ?)

thru me and into everything (lävitseni kaikkeen)

flowers stand frail & grow over me
hundred white ones
sprount on all the limbs
blend with a though
with the soil

trees build roots deep on me,
bridges snaking
to join with the soil, away

Site officiel
Extraits audio sur le Myspace de Tenhi
UTUstudio

 

A noter que l'album rétrospective pour leurs 10 ans d'activité est sorti au mois d'Août dernier, repressant les deux toutes premières démos, Airut:Ciwi, des versions alternatives ainsi qu'un très bon (et plus sombre opus à ce jour) "album" inédit nommé Kaski, le tout dans un livret somptueux. Aisément commandable via le mailorder de Prophecy Productions.

Trailer de Folk Aesthetic (titre inédit Kausienranta)
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- 1.V~-19937

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